samedi 25 mars 2017

Conférence sur l’indépendance des médias



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Compte-rendu de la conférence

  • Les médias d’information

35 000 journalistes accrédités en France et répartis entre : 

- La presse écrite (générale-spécifique de loisirs et professionnelle) : 300-400 000 tirages par jours pour les journaux les plus diffusés – 500 publications pour la presse générale – 4000 pour la presse spécialisée. LMD : 80 000 ; L’indépendant : 40 000
- La télévision et la radio
- Internet


  • Les grands groupes de presse

La majorité des médias sont dans les mains du pouvoir économique. Pourquoi investir dans la presse écrite en perte de vitesse ?
 
- influence politique : Xavier Niel « les politiques viennent me manger dans la main », il a les numéros personnels de tous les ministres, un réseau social qui n’a pas de prix

- outil de promotion d’une entreprise : ex : le luxe a besoin d’une image de marque (Pinault, Arnault), publicité pour les rafales dans le Figaro Madame, censure sur les problèmes avec la justice (Dassault)

- logique capitaliste, marchande et managériale : gagner de l’argent en agissant sur :
Les dépenses (licenciement du personnel journaliste) : effet sur la qualité de l’information (enquêtes, recoupes, vérification…) qui ne laisse plus de place à l’analyse. TF1 n’a plus de permanent dans l’hémisphère sud. 
Les recettes : 40 à 50% de revenus publicitaires pour la presse écrite. Les publicitaires veulent de l’audience ce qui amène à traiter des sujets qui suggèrent l’empathie, qui privilégie les faits divers, le sensationnel, le people. La censure se fait dans le choix de l’information et sa position dans l’actualité.
Ex : casse-toi riche con ! (Arnault a retiré sa publicité sur le journal). Bolloré a demandé aux journalistes d’éviter toute attaque contre les intérêts actuels ou futurs du groupe.
Uniformise l’information, sources identiques provenant des agences, journalistes qui restent au bureau. 

- fixe la ligne éditoriale en nommant les directeurs du journal
Parfois les sociétés de journalistes contestent la nomination d’un directeur (France télévisions, L’Express avec C. Barbier, L’Obs, Itélé, Canal +). Celui qui détient le journal possède ce pouvoir.
Ex : manifestations contre la loi travail. Dégradations mineurs requalifiées par les médias de masse comme un saccage par les manifestants, dégrade le capital sympathie que l’on peut avoir pour les syndicats (patron de la CGT qualifié de « terroriste ») : on donne de l’importance à des faits qui détournent de l’analyse et la compréhension.

La presse écrite pourrait disparaitre d’ici à 10 ans.


  • ·    Internet : information plurielle ?

Avantages : Immédiateté, interactivité (image, films…), diversité : constitue l’avenir.
Mais on retrouve les mêmes défauts que sur la presse écrite.
Mis à part les sites payants (médiapart…), les autres vivent à 100% de la publicité du fait de leur apparente gratuité ce qui biaise l’information fournie.
Les grands journaux ont leur propre site et les « pure players » (nés sur internet) sont vite rachetés par les GAFA et autres grandes fortunes à moindre frais. Cela amène le même niveau de concentration que la presse écrite.
- Google : 400 milliards de recherches par an en France ce qui rapporte 1.5 milliards de recettes. Le classement des recherches se fait par des algorithmes (calculs de répétition de mots) et en fonction de la contribution payée. L’information fournie n’est donc pas classée en fonction de la qualité de l’information par des journalistes. Le buzz, l’audience met des infos en avant qui gagnent encore davantage en audience, alimentant parfois de fausses informations (fake news).
- Facebook gagne 4 dollars par an par internaute en revendant des informations à des publicitaires.
- Charte éthique d’Apple : le journal s’interdit de parler de tabac, de sexe, de violence, de tourisme pour ne pas nuire à l’image de la marque. Forme de censure : information qui ne fait de tort à personne.

La gratuité est donc un mythe : la publicité qui la finance se paye lorsque nous allons acheter quelque chose. Forme d’impôt caché, indolore.

2 grandes écoles de journalisme en France : privées donc coûteuses, sélectionnent le recrutement des journalistes, formatent l’information. Devient une caste, c'est-à-dire un journalisme qui défend les intérêts de sa classe.


  • ·    L’information est un bien commun

L’information est un bien commun comme l’air que l’on respire car elle permet à chacun d’être éclairé pour se faire une opinion et exercer sa vigilance citoyenne dans une société démocratique.
L’information est une arme car elle fabrique l’opinion publique (et peut faire une élection par exemple).
- Article 11 de la DDH : "la libre communication des pensées et des opinions est un des droits les plus précieux".
- « Manifeste des jours heureux » écrit par des groupes résistants pendant la 2e GM et publié à la libération : propose des buts à atteindre pour la société à venir. Dont « honneur de la presse sera retrouvé à condition de son indépendance à l’égard de l’Etat et des puissances d’argent. » Concentration de la presse déjà au XIXe aux mains des grandes familles. De nombreux journaux sont ainsi apparus à ce moment avant un nouveau mouvement de concentration.


  • ·   Quelles solutions pour l’indépendance de la presse ?

- Journalisme indépendant (sans publicité, financé par les lecteurs, les journalistes, le crowdfounding) : Politis, LMD, Fakir, le Canard Enchaîné (centenaire), Médiapart, Arrêt sur image, La décroissance… Mais manque d’audience et de moyens de diffusion.

- Une "sécurité sociale de l’information"
Séparer les journaux d’information générale et spécifique. 
3 conditions : pas de publicité, pas de dividendes (pas de but lucratif), pas de concentration. Un service public pourrait gérer la logistique commune des journaux (édition, imprimerie, administration…) tandis que les journalistes seraient financés par le lectorat. Il existe déjà des subventions à la presse (1.6 mds d’euros par an, 16 millions par exemple pour le Figaro, l’Etat finance les journaux depuis 1796 pour faire vivre la démocratie selon l’idéal révolutionnaire) mais celles-ci financent principalement les grands journaux possédés par des milliardaires.
« La chèvre broute là où elle est attachée » : il ne faut pas que les journalistes soient rémunérés par les forces de l’argent ou l’Etat.


  • Citations

Jaurès : « l’influence formidable qu’exerce sur l’opinion une presse qui donne à la même heure le même son de cloche et qui pousse le même troupeau dans le même chemin »
Camus (1944) : « peut-on dire qu’aujourd’hui notre presse vit de prudence et ne se soucie que de sincérité… »


  • Le Monde Diplomatique

- Gazette des ambassades et supplément du journal Le monde à l’origine.
- Filialisation grâce au don d’un riche donateur Gunter Holzmann (antifasciste allemand ayant fui le nazisme en Amérique du sud)
- Actionnariat : ¼ pour les lecteurs, ¼ pour le personnel, ½ dans le groupe Le Monde

Points forts :
- Indépendant : pas de publicité, financé par ses lecteurs, journalistes permanents, réseau d’universitaires
- Présent sur internet depuis 1995 (pionnier) avec un immense fond d’archives très utilisé par les universitaires
- International : journal français le plus lu dans le monde (40 pays, vingtaine de langues)

Mensuel d’analyse et d ‘investigations (ne se contente pas de relater des faits immédiats), ayant une ligne éditoriale de critique du capitalisme. A l’origine du mouvement altermondialiste (Attac, Nuit Debout, Forum social mondial…).

Devise : « On s’arrête… On réfléchit ». Nous sommes submergés par l’information et nous n’avons plus le temps pour réfléchir.


  • ·    Les Amis du Monde Diplomatique

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